« le prix de la liberté, c’est la vigilance éternelle ... · à jérusalem p. 25 •...

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« Le prix de la liberté, c’est la vigilance éternelle » Thomas Jefferson Courrier du C.V.P.R. Bulletin du Comité de Vigilance pour une Paix Réelle au Proche-Orient AVRIL • MAI • JUIN • 2018 • N° 69 SOMMAIRE • Israël doit être sanctionné par les Etats et boycotté par les citoyens Par Leila Shahid p. 3/4 • Le tango sioniste : un pas à droite un pas à gauche Par Gidéon Lévy p. 5/6 • Ce que les combattants juifs de 1948 disent sur le Nakba Par Thomas Vascovi p. 7/8/9 • La Palestine rejoint deux instances de l’ONU p. 9 • Les Palestiniens misent sur la justice internationale p. 9/10 Dossier : « La grande marche du retour » p. 11 à 18 • BDS dans le monde p. 19 à 21 • Israël, les bédouins et la terre Par Marianne Meunier p. 22 • Contre l’antisémitisme avec détermination et sang froid Par Dominique Vidal p. 23 • Antisémitisme et antisionisme deux enquêtes en forme démen- tie Par Dominique Vidal p. 24 • Les amis antisémites de Trump à Jérusalem p. 25 • L’annulation du match de football Israël - Argentine p. 25 • Le courrier des lecteurs p. 26 • Livres p. 27 • Le colloque du 13 octobre p. 28 dès maintenant inscrivez-vous au colloque « Du déni de Palestine à l’apartheid » que nous organisons à Paris, en partenariat avec le journal en ligne orIENt XXI 13 octobrE 2018 au Palais du Luxembourg N'oubliez pas de régler votre cotisation 2018 Editorial La Nakba Et La GraNdE MarchE du rEtour L éditorial du N° 49 (avril, mai, juin 2013) évoquant la Nakba, rappelait que, le 15 mai, des centaines de milliers de Palestiniens avaient célébré cette catastrophe, tant en Palestine occupée, que dans les camps dits de « réfugiés » établis dans les pays voisins. La cause, à l’origine, divers massacres effectués par la Haganah (l’armée secrète) et les milices juives (Irgoun et Stern), ainsi celui de Deir Yassine - l’Oradour-Sur-Glane palestinien - le 9 avril 1948, avant la proclamation de l’Etat d’Israël, le 15 mai 1948. Puis, l’exécution du plan politico-militaire mis au point par les dirigeants israéliens, David Ben Gourion en tête, le plan Daleth. Son but : délester Israël du plus grand nombre possible d’Arabes palestiniens, musulmans ou chrétiens. Ces Palestiniens étaient expulsés, en même temps que l’armée israé- lienne battait, les très faibles et inorganisées armées arabes, entrées en guerre après le 15 mai, et permettait à Israël de gagner 25 % de plus du territoire du mandat... Dans son livre « Le nettoyage ethnique de la Palestine » Ilan Pappé écrit : « A la fin de 1947, les 2/3 des 2 millions d’habitants de la Palestine étaient Arabes. Un an plus tard, les Juifs étaient largement majoritaires dans un Etat occupant 78 % du territoire et, 800 000 Arabes palestiniens étaient parqués hors des frontières. Entreprise planifiée d’expulsion, de destruction (500 villages rasés) et de massacres compa- rables aux « nettoyages ethniques » qualifiés de crimes contre l’huma- nité » (page 248). Ce nettoyage ethnique n’était autre que la réalisation • Suite page 2 DR

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  • « Le prix de la liberté, c’est la vigilance éternelle » Thomas Jefferson

    Courrier du C.V.P.R.Bulletin du Comité de Vigilance pour une Paix Réelle au Proche-Orient

    AVRIL • MAI • JUIN • 2018 • N° 69

    SOMMAIRE

    • Israël doit être sanctionné par lesEtats et boycotté par les citoyensPar Leila Shahid p. 3/4

    • Le tango sioniste : un pas à droiteun pas à gauchePar Gidéon Lévy p. 5/6

    • Ce que les combattants juifs de1948 disent sur le NakbaPar Thomas Vascovi p. 7/8/9

    • La Palestine rejoint deux instances de l’ONU p. 9

    • Les Palestiniens misent sur la justice internationale p. 9/10

    Dossier : « La grande marchedu retour » p. 11 à 18

    • BDS dans le monde p. 19 à 21

    • Israël, les bédouins et la terrePar Marianne Meunier p. 22

    • Contre l’antisémitisme avecdétermination et sang froidPar Dominique Vidal p. 23

    • Antisémitisme et antisionismedeux enquêtes en forme démen-tiePar Dominique Vidal p. 24

    • Les amis antisémites de Trumpà Jérusalem p. 25

    • L’annulation du match de football Israël - Argentine p. 25

    • Le courrier des lecteurs p. 26

    • Livres p. 27

    • Le colloque du 13 octobre p. 28

    dès maintenant inscrivez-vousau colloque

    « Du déni de Palestine

    à l’apartheid »

    que nous organisons à Paris, en partenariat avec le journal en ligne

    orIENt XXI

    13 octobrE 2018au Palais du Luxembourg

    N'oubliez pas de régler votre cotisation 2018

    Editorial

    La Nakba Et La GraNdEMarchE du rEtour

    L éditorial du N° 49 (avril, mai, juin 2013) évoquant la Nakba,rappelait que, le 15 mai, des centaines de milliers de Palestiniensavaient célébré cette catastrophe, tant en Palestine occupée, quedans les camps dits de « réfugiés » établis dans les pays voisins.

    La cause, à l’origine, divers massacres effectués par la Haganah (l’armée secrète) et les milices juives (Irgoun et Stern), ainsi celui de DeirYassine - l’Oradour-Sur-Glane palestinien - le 9 avril 1948, avant la proclamation de l’Etat d’Israël, le 15 mai 1948. Puis, l’exécution du planpolitico-militaire mis au point par les dirigeants israéliens, David BenGourion en tête, le plan Daleth. Son but  : délester Israël du plus grandnombre possible d’Arabes palestiniens, musulmans ou chrétiens.

    Ces Palestiniens étaient expulsés, en même temps que l’armée israé-lienne battait, les très faibles et inorganisées armées arabes, entrées enguerre après le 15 mai, et permettait à Israël de gagner 25 % de plusdu territoire du mandat...

    Dans son livre « Le nettoyage ethnique de la Palestine » Ilan Pappéécrit  : «  A la fin de 1947, les 2/3 des 2 millions d’habitants de laPalestine étaient Arabes. Un an plus tard, les Juifs étaient largementmajoritaires dans un Etat occupant 78 % du territoire et, 800 000 Arabespalestiniens étaient parqués hors des frontières. Entreprise planifiéed’expulsion, de destruction (500 villages rasés) et de massacres compa-rables aux «  nettoyages ethniques »  qualifiés de crimes contre l’huma-nité » (page 248). Ce nettoyage ethnique n’était autre que la réalisation

    • Suite page 2

    DR

  • du mythe sioniste, prôné dès la création du Mouvement en 1897 : « Un peuplesans terre pour une terre sans peuple » !

    Afin de montrer leur volonté de résistance et leur rêve du retour, trans-mis de génération en génération, les Gazawis, enfermés dans leur prison àciel ouvert, décidèrent, à l’occasion du 70ème anniversaire de la Nakba, unegrande « Marche du retour », au grand dam des occupants, qui rejettent ce« droit au retour ». Cela reviendrait à voir disparaître un jour leur proprerêve, un Etat juif, débarrassé de tous les non juifs !

    La société civile a été l’organisatrice de cette initiative populaire non violen-te «  imposant son mode de mobilisation et ses mots d’ordre au Hamas, trèsinquiet de perdre le contrôle de la situation à Gaza », comme l’écrit le profes-seur J.P. Filiu (1). Il s’agissait de montrer que, pour tout Palestinien, le « droit auretour » - reconnu par la résolution 194 de l’ONU - est sacré, et, en même temps,d’exiger la levée du blocus pesant sur la population depuis plus de dix ans !

    Cette « Marche » débuta le 30 mars - « Journée de la Terre » en Israël,et en Palestine occupée - et se poursuivit tous les vendredi, jusqu’au 15 mai.Elle était d’autant plus importante que, mettant de l’huile sur le feu, cemême jour, était inauguré le transfert de l’ambassade étasunienne àJérusalem, après la reconnaissance de « Jérusalem comme la capitaled’Israël », par Donald Trump, au plus grand mépris du droit international.

    Ces manifestations pacifiques se déroulèrent, à l’intérieur de la bande deGaza, le long de la barrière qui la sépare d’Israël. Cela n’empêcha pas lestireurs d’élite israéliens, postés de l’autre côté, de jouer « au tir aux pigeons »...mais à balles réelles ! « Les manifestants balancent des pierres... et ils se pren-nent des balles » rapporte dans « l’Obs », la photographe Laurence Geai pré-sente sur les lieux le 14 mai, jour qui déboucha sur un bain de sang : 69 morts,2 900 blessés, abattus par des tireurs goguenards selon certaines vidéos...

    Benyamin Netanyahou a justifié ces massacres par «  la défense sacréed’Israël  » ! Un mensonge de plus pour justifier l’injustifiable. LesIsraéliens étaient retranchés derrière des fortifications. Quelle menacereprésentait donc ces foules désarmées ? Le terrible bilan de ces journéesen témoigne : côté israélien aucune victime, et pour cause ! Côté palesti-nien 112 morts, dont 13 jeunes de moins de 18 ans, 5 enfants de moins de12 ans, 2 femmes, 1 journaliste, et 313 190 blessés dont 296 enfants et 1029femmes, par balles réelles, balles en caoutchouc ou agent de gaz lacrymo-gène. Des centaines d’amputés handicapés à vie.

    Je ne peux ici passer sous silence, l’ ONG israélienne B’Tselem, qui,pour moi, sauva l’honneur d’Israël en « condamnant cette atroce répres-sion, contraire au droit international  » ; et «  demandant, en vain, à plusieurs reprises aux dirigeants politiques et militaires de mettre fin à lapolitique de «  feu ouvert  », et aux soldats de ne pas suivre les ordres illégaux de tirer sur des manifestants non armés ».

    Face à ce nouveau drame vécu par les Gazawis, comment ont réagi lesdirigeants occidentaux ? Un flot de belles paroles du genre « retenez-moi,ou je vais faire un désastre » ! Mais, une fois de plus, aucune sanction,comme depuis 1967, pour ne pas dire comme depuis 1948... Bref, pouremployer un mot arabe « Er-rih » (du vent) !

    70 ans après la Nakba, occupation, répression, colonisation, destruction,expulsion de Bédouins et de Jérusalémites se poursuivent. Et demain, quelsnouveaux massacres ? Quel nouveau nettoyage ethnique ?

    Maurice Buttin, président du CVpr po

    (1) Dans son blog le 22 avril 2018.

    EDITORIAL

    • Suite de la première page

    diXit

    � Golda Meïr

    « Nous pouvons pardonner aux

    arabes de tuer nos enfants, nous

    ne pouvons leur pardonner de

    nous forcer à tuer leurs enfants.

    La paix s'installera le jour où les

    Arabes aimeront plus leurs

    enfants qu'ils nous haïssent ».

    Dans un message sur les

    réseaux sociaux, paru le 15 mai, le

    CRIF ajoute ce propos inquali-

    fiable : "C'est toujours d'actuali-

    té" ! Comme l'écrit le MRAP, dans

    un communiqué condamnant cet

    « ignominieux message raciste :

    Inversons les mots Arabes et Juifs,

    dans cette citation chacun y verra

    l'antisémitisme le plus abject »

    � le pasteur NaiM ateek

    écrit ces lignes prophétiques

    dans un livre paru en 2017 (1)

    « Gaza a aussi besoin d'une stra-

    tégie non-violente où des

    dizaines de milliers de gens, sous

    la conduite de leurs chefs reli-

    gieux et de leurs leaders poli-

    tiques, marchant chaque semai-

    ne jusqu'à la clôture de la prison

    à ciel ouvert qu'est Gaza, avec

    des pancartes et des slogans qui

    disent : ‟Nous voulons la justi-

    ce”. Il faut que leur cri retentisse

    jusqu'aux extrémités de la terre.

    Pour qu'advienne la libération,

    il faut que cette stratégie soit

    appliquée sans mollir et sans

    qu'un seul coup de feu soit tiré. »

    (1) ‟A Palestinian Theology ofLiberation”,  dont les "Amis de

    Sabeel-France" préparent l’éditionprochaine en français.

    Courrier du CVPR, n°68 - p. 2

  • Courrier du CVPR, n°69 - p. 3

    • Que cherche Israël en commet-tant un tel massacre, en perpé-trant ce qui semble être descrimes de guerre, voire des crimescontre l’humanité ?

    — Leila Shahid : Israël poursuit sapolitique habituelle, de tout-militaire,de répression, d’écrasement effroyablepar la disproportion des méthodesemployées face à une populationcivile désarmée mais qui a choisi derevenir à une forme de lutte paci-fique, non violente, de résistance àl’occupation qui dure depuis 51 ans.Nous en sommes à la quatrième guer-re contre Gaza depuis dix ans. Celle-là est peut-être la pire de toutes parcequ’on assiste au retour à une Intifadapacifiste qui est menée uniquementpar les jeunes de Gaza, absolumentpas par le Hamas, ni d’ailleurs par leFatah. C’est une nouvelle générationde jeunes Gaziotes, qui vivent main-tenant depuis onze ans totalementassiégés. Ils sont enfermés par l’ar-mée israélienne, qui prétend avoirquitté Gaza. Mais, selon le droit, tantque l’armée est présente à tous lesaccès terrestres, aériens et maritimes,c’est un territoire occupé. Gaza estaussi assiégée par les Égyptiens, quiont fermé le seul accès que la popula-tion avait vers l’extérieur. Mais elleest également assiégée par la guerrede pouvoir entre le Hamas etl’Autorité palestinienne. Le Hamaslui infligeant un régime qui n’arrivepas réellement à avoir des relationsinternationales et qui ne reçoit aucu-ne aide ; l’Autorité palestiniennerefusant de payer les salaires et lesfactures d’électricité, pensant fairepression sur le Hamas.

    Donc, cette population est totale-

    veau président américain. Il a le sen-timent de pouvoir faire ce qu’il veutet, donc, il « finit le boulot » de net-toyage ethnique commencé il y a 70 ans. Comme il ne peut pas jeter lesPalestiniens à la mer comme en 1948,à cause des téléphones portables, desjournalistes, des réseaux sociaux, ilnous écrase avec une violence mili-taire choquante. D’ailleurs, même lesresponsables militaires israéliensdisent maintenant qu’ils ont perdu labataille de l’image. Ils sont en trainde commettre des crimes de guerrepour lesquels ils devront rendre descomptes devant la Cour pénale inter-nationale (CPI) et toutes les instancesinternationales si la conscience dumonde se réveille.

    • Est-ce que la réaction internatio-nale est à la hauteur de ce qui esten train de se passer ?

    — Leila Shahid : Je pense que ce quis’est passé le 14 mai et la mort de 62 Palestiniens en 24 heures ont pro-voqué un changement fondamentaldans les opinions publiques mon-diales, y compris en Israël. Parce qu’ily a un nouveau contexte mondial.Cela fait maintenant plus de trois ansqu’on nous dit que la question pales-tinienne n’est plus prioritaire, qu’on

    LeiLa Shahid : « israël doit être sanctionné parles États et boycotté par les citoyens »

    Entretien réalisé par Pierre BarBanCEy

    PALESTINE

    C elle qui fut longtemps ambassadrice de Palestine en France puis auprès del’Union européenne, met en perspective les manifestations de Gaza, les crimes deguerre israéliens et l’attitude des gouvernements dans le monde.

    Leila Shahid devant la façade du MUCEM quiannonce l'Exposition "Lieux Saints partagés"

    ment abandonnée à elle-même. Et le monde, à com-mencer par le monde arabe,regarde ailleurs, regardel’Iran, qui est devenu, grâceà Trump, l’ennemi à abattre.Netanyahou se trouve être lemeilleur allié de Trump. Ilapplaudit la décision améri-caine de reconnaître Jérusalemcomme capitale d’Israël et de démé-nager l’ambassade. Les Israélienspensent pouvoir faire tout ce qu’ilsveulent et être impunis.

    • Israël cherche-t-il à mater totale-ment le nouveau mouvementpalestinien ou à créer la zizanie ?

    — Leila Shahid : Israël n’a pas changéde politique depuis 70 ans. Ce qui veutdire que tout ça se passe au moment dela commémoration de la Nakba, lacatastrophe, qui est la dépossession desPalestiniens de leur patrie, de leur sol,de leur identité, de leur culture, de leurhistoire, de leur mémoire. Cette poli-tique n’a pas changé même s’il y a eudifférents moments entre les tra-vaillistes et le Likoud et, aujourd’hui, ceque j’appellerai le post-Likoud. C’est-à-dire un pays qui prend le chemindu racisme et du fascisme. Parce quela composition actuelle de la Knessetet du gouvernement est beaucoupplus grave que le Likoud. C’est unamalgame de partis racistes.

    Netanyahou continue l’annihila-tion de toute revendication de lapopulation palestinienne commeNation. Netanyahou ne veut pas d’É-tat palestinien, ne veut pas recon-naître une Nation palestinienne. Il estsoutenu dans ce domaine par le nou-

    DR

  • s’occupe de l’Iran et du terrorisme.Trump et Netanyahou avaient réussi àassimiler les Palestiniens à tout cemouvement de terrorisme internatio-nal. C’est pour cela qu’ils tiennentabsolument à dire que les marches àGaza sont organisées par le Hamas, cedernier étant un mouvement se reven-diquant de l’islamisme. Ils mettenttout dans le même sac.

    Mais les moyens de communica-tion existants permettent aux gens dese faire leur propre opinion. Ils ont vuen live l’assassinat de 62 personnes,les tirs à balles réelles sur des journa-listes, des secouristes, des familles,qui ont blessé en un jour 2 700 per-sonnes. Depuis le 30 mars, il y a 12 000 blessés, dont certains seronthandicapés à vie à cause de l’utilisa-tion de balles explosives. Or les jeunesà Gaza n’ont pas eu recours aux armesalors qu’ils le pouvaient. Les jeunesont décidé de ne pas le faire parcequ’ils ont une nouvelle stratégie, parceque les roquettes stupides du Hamassur Sdérot donnaient des justificationsaux Israéliens pour bombarder Gaza.Il y a des moments dans l’histoire oùs’expriment le courage des peuples,leur détermination à se sacrifier(parce qu’ils n’ont rien d’autre àpart la force de leurs convictions).Ce peuple a voulu forger son propredestin avant même la création del’État d’Israël, en luttant contre lacolonisation britannique.

    Mais il faut aussi voir, au momentoù Trump et Netanyahou, frèresjumeaux racistes et populistes, cher-chent la guerre, que, pour la premièrefois en 70 ans, vous avez des paysarabes avec les Américains et avec lesIsraéliens, contre les Palestiniens. Àcommencer par l’Arabie saoudite etles Émirats arabes unis, qui considè-rent aujourd’hui que leur premierennemi, c’est l’Iran et donc que leurspremiers alliés sont Trump etNetanyahou. Comme l’a dit le princehéritier saoudien, Mohammed benSalmane lors d’une réunion avec ungroupe sioniste aux États-Unis lors deson voyage officiel il y a un mois, lesPalestiniens « devraient se taire » (« shuttheir mouth ») ou accepter la grande

    proposition de Trump. Or il n’y a pasde proposition mais une décision uni-latérale d’imposer aux Palestiniens,avec l’aide de certains pays arabes, desbantoustans séparés par cette nouvelleJérusalem métropolitaine qui va êtredix fois plus grande que celle d’au-jourd’hui. Toutes les colonies auxalentours seront annexées à Jérusalem.Et comme c’est la « capitale » recon-nue par Washington, le gouvernementisraélien va essayer de toutes lesmanières (économique, sociale, phy-sique) d’expulser les Palestiniens etd’intégrer les 250 000 colons qui sontà Jérusalem-Est pour poursuivre cequ’il appelle sa « guerre démogra-phique ». Jérusalem va atteindre, àl’est, Jericho, au nord, Ramallah, et, ausud, Bethléem. Ce n’est pas un inci-dent. C’est un moment clé. Ceux quil’ont compris sont ces magnifiquesjeunes de Gaza, dont le plus vieux a30 ans, qui n’ont rien demandé àpersonne. ni au Hamas, ni au Fatah,ni aux arabes, ni aux américains, niaux Européens. Ils ont secoué laconscience du monde en se sacrifiantparce que c’est leur seule arme.

    • Faut-il encore compter sur lesÉtats-Unis pour une paix juste etdurable ?

    — Leila Shahid : Je n’ai jamaispensé que les Américains étaient desparrains objectifs. Ils ont hérité desBritanniques. Pendant la guerre froi-de, ils étaient opposés aux droits desPalestiniens et aux pays arabes.Après la chute du mur de Berlin, il ya eu une petite fiction à la conférencede Madrid, qui s’est très vite effon-drée. Yasser Arafat savait tout ça etn’avait pas d’illusions. Il a acceptéOslo et il est revenu en Palestine. Cequi est maintenant irréversible. Car ilfaut se rappeler que l’Organisation delibération de la Palestine (OLP) a untalon d’Achille. Elle a commencédans les camps de réfugiés, dansl’exil. Pas dans les territoires occupéscomme au Vietnam, en Algérie ou enAfrique du Sud. C’est pourquoiArafat restera comme un très granddirigeant : c’est le premier qui ramè-ne les Palestiniens chez eux en leurenjoignant de continuer. Il a même

    dit qu’il ne verrait pas la Palestinemais qu’il se faisait un devoir de pas-ser de la phase de l’exil à celle de lalutte à partir de la Palestine. Oslo estterminé. (...)

    • Faut-il sanctionner et boycotterIsraël ?

    — Leila Shahid : Pourquoi la Russieest-elle sanctionnée lorsqu’elle annexela Crimée mais pas Israël qui annexeJérusalem ? Pourquoi les boycottagescontre Cuba, la Libye, le Congo,contre l’apartheid et pas contre Israël ?Le mouvement BDS ne doit pas êtresimplement le fait de citoyens coura-geux dans le monde, il doit être appli-qué aussi par les États. C’est unearme non violente. Nous ne deman-dons pas que vous bombardiez Israël.Nous exigeons que vous appliquiezce que le droit impose : des sanctionséconomiques, politiques, diploma-tiques et le boycott de tout ce qui a àvoir de près ou de loin avec cettepolitique d’occupation et ces crimesde guerre. Que les Parlements des 28 États de l’Union européennevotent des résolutions pour le boycottcomme forme de pression non vio-lente sur Israël. En premier lieu, ilfaut la suppression de la saisonFrance-Israël, qui n’est là que pourredorer le blason de la force occupan-te. n’est-ce pas une honte qu’onfasse la propagande d’un pays l’an-née des 70 ans de la nakba, de ladépossession des Palestiniens ?Voyez comment l’histoire est faite :les jeunes de Gaza se sont invités àla table sans qu’on les y ait conviés.Et c’est ça qui compte. Les autoritésen France peuvent faire autant demanifestations qu’elles veulent, celan’occultera pas la politique d’occu-pation criminelle qu’Israël pratiqueà l’égard du peuple palestiniendepuis 51 ans et celle de la déposses-sion de la Palestine depuis 70 ans.

    Mardi, 22 Mai 2018 - L'Humanité

    Voir : https://www.humanite.fr/leila-sha-hid-israel-doit-etre-sanctionne-par-les-etats-et-boycotte-par-les-citoyens-655587.(NDRL : les passages en gras sont de larédaction).

    Courrier du CVPR, n°69 - p. 4

    PALESTINE

  • � Grant Smith : Je suis très heureuxd’accueillir de nouveau le chroniqueurde Haaretz, Gidéon Lévy, dont lescolonnes du journal appelaient lesIsraéliens à une plus grande empathieenvers les Palestiniens (…). Il a été lelauréat avec le pasteur palestinienMitri Rabeh, du prix Olaf Palme en2016 pour leur combat contre l’occu-pation et la violence.

    � Gidéon Lévy : (...) C’est ma troi-sième apparition devant ce publicmerveilleux et je me sens chez moi. Jene suis plus jeune, je vieillis. Vousavez l’énergie et êtes pleins de vie etde dévouement, alors que, moi, je suisde plus en plus désespéré. Mais celame met au défi, car, lors de madeuxième participation, ici, j’ai com-mencé mon allocution avec par la peurde me répéter et que, vous, vous alliezvous ennuyer à mourir, car, à la fin, jesuis un chanteur et cette chanson, vousl’avez déjà entendue.

    Mais les organisateurs ont été suffisamment subtils, cette fois-ci,pour donner un titre à mon discoursqui ne me permet pas de chanter. J’aidonc introduit une autre chanson etje ferai de mon mieux. (...)

    La Conférence de l’aIPaC

    Vous avez peut-être la clé pour unchangement, pour l’espoir car l’espoird’un changement au sein de la sociétéisraélienne est très faible. Il n’existepas….. Jamais comme maintenant lesEtats-Unis et Israël ont partagé lesmêmes valeurs. Le seul endroit surterre où Donald Trump est aimé,adoré, admiré et apprécié est Israël. Leseul endroit où Netanyahou est admi-ré, adoré, apprécié, aimé, ce sont les

    Etats-Unis. Si ces valeurs ne sont paspartagées, que sont-elles alors ?Quelques uns de mes anciens grandsamis arrivent pour le véritable évé-nement, la Conférence de l’aIPaC -politiciens, journalistes - ce que j’ap-pelle la Conférence annuelle desTrafiquants de drogues. Ils discutentdu volume de drogues à fournir à cedrogué à l’occupation qu’est Israël,combien de formules d’amitié, ilsexprimeront et combien d’argent etarmes, ils lui feront parvenir.(NDLR : souligné par nous). Je peuxvous dire qu’aux Etats-Unis, en tantqu’Israélien, nous n’avons pire ennemique le lobby juif. Nous n’avons pas deplus grand ennemi de la justice, de lapaix et de l’égalité qui ceux qui pen-sent que, si vous fournissez plus dedrogues à un drogué, vous êtes sonami, si vous le soutenez aveuglément,et automatiquement, quoi qu’il fasse,vous êtes son ami. Non, ce ne sont pasdes amis mais des ennemis (…).

    Le titre de mes lectures parle desionisme et le sionisme est l’une desdeux religions d’Israël et en tant quereligion, vous ne pouvez la remettreen question. La seconde religion est,de toute évidence, la religion de lasécurité. aussi, entre le sionisme etla sécurité, quiconque en Israël osesoulever une interrogation estimmédiatement perçu comme untraître. Il est impossible de décrire ceque signifie avoir des questions àpropos du sionisme. Imaginez quevous questionniez aujourd’hui l’autrereligion, si vous doutiez de l’affirma-tion que les Forces de DéfenseIsraéliennes ne sont pas l’armée laplus morale au monde – disonsqu’elle est la deuxième armée - com-ment osez-vous ?

    Nous la buvons dans le lait denotre mère (…). Il est difficile, del’extérieur, de comprendre commentune idéologie devient une portion denotre ADN (...) et qu’il n’y pas deplace pour un point d’interrogation.Je sais comment j’ai grandi. Je sais ceque j’ai pensé de ceux qui, rares,rares, très rares, assuraient n’être passionistes ou, Dieu me garde, pas anti-sionistes. Ils étaient le diable mêmes,ils étaient juifs et israéliens.

    Je n’ai pas souvenance d’une idéo-logie si totalitaire, si sainte, si bénie,que vous n’ayez le droit de douter oud’interroger - rien. Ni à propos dupassé, de l’avenir, même du présent-rien (…) Vous ne faites pas partie dela société. Allez à Damas, allez àGaza. Ne restez pas ici.

    Shimon Peres et les colonies

    Ce qui me conduit au titre, parceque, si le sionisme est en jeu, nousdevons faire face à la réalité, il n’y aaucune différence, en Israël, entre ladroite et la gauche. Quand il s’agitde l’occupation qui fait partie inté-grante du sionisme, il n’y a aucuneréelle différence (...). Quand j’évoquela gauche et la droite, je veux direcette prétendue gauche sioniste, travaillistes et autres, et l’extrêmedroite. La différence n’est que rhéto-rique (…) en fin de compte, quandvous portez un jugement sur la vraiepolitique, pas la rhétorique, vousconstatez que la gauche et les tra-vaillistes pratiquent une rhétoriquecommune beaucoup plus sympathiqueque les péchés que j’ai commis.

    L’un de ceux-ci est d’avoir travailléquatre ans avec Shimon Peres, qui ne

    Courrier du CVPR, n°69 - p. 5

    DR

    LE TanGo SIonISTE :un pas à droite, un pas à gauche par Gideon LÉVy

    Intervention lors de la conférence intitulée : « Le lobby israélien et lapolitique américaine 2018 » organisée à Washington le 2 mars 2018,au national Press Club, juste avant la réunion annuelle de l’aIPaC(American Israel Public Affairs Committee). Cette conférence qui adénoncé une fois de plus l’influence du lobby israélien aux Etats Unis, était patronnée,comme les précédentes, par le magazine Washington Report on Middle East Affairs.

    ISRAËL

  • cessait de parler de mettre fin à l’occu-pation, de dire qu’il n’était pas démo-cratique qu’un peuple en gouverne unautre. De belles idées que BenyaminNetanyahou et autres extrémistes dedroite n’auraient pas prononcées. Maisen fin de compte, Shimon Peres, prixnobel de la Paix, est le père fonda-teur du projet des colonies. aussi,cette gentille rhétorique nous permetde donner à Israël un visage agréableavec les mêmes crimes. (NDLR :Souligné par nous).

    L'occupation

    (…) Comme vous devez le savoir,elle ne figure pas à l’ordre du jour.C’est l’une de ces choses, comme lapluie, le soleil, la force majeure (...).Car personne n’imagine que l’onpuisse changer (...) Cela se passe àune demi-heure de chez nous, qui enparle, qui s’en soucie ?

    Pourtant, les crimes sont quotidiens(...). Les medias ne les mentionnentpas, et s’ils le font, c’est toujours selonune narration sioniste. Un terroriste de12 ans, une fillette de 14 ans avec desciseaux est une menace existentiellepour Israël. Une adolescente qui frappeun soldat mérite l’emprisonnement àvie, pas moins, une fille dont le cousin,une heure auparavant, a reçu une balledans la tête des soldats israéliens, à 50 mètres de chez elle. Maintenant,l’armée prétend que l’incident a étéfabriqué. Quand Israël ose prétendreque la blessure de cet enfant, MohamedTamimi, que j’ai rencontré quelquesjours plus tard, qui a perdu la moitié deson cerveau, est une blessure fabriquée,alors vous vous apercevez qu’Israël esttotalement désespéré. Si Israël abesoin de ce type de propagande, s’ils’abaisse en niant les tirs sur unenfant de 15 ans et affirme qu’il esttombé de bicyclette, vous comprenezque les choses empirent. Il y a peut-être un espoir pour un nouveaudépart, mais pour l’instant, on en estloin. (NDLR : souligné par nous).

    Tout cela flotte au-dessus de lasociété israélienne comme si rien nes’était passé. Je ne peux concevoir unesociété où le déni soit si généralisé,incluant tant la gauche que la droite, àl’exception des militants d’extrême-gauche. (….) Ils ne sont pas nombreux

    et totalement délégitimisés. Aussi,quand je dis gauche, c’est la gauche tra-vailliste ; Yeshuati, la nouvelle promes-se politique israélienne, peut-être, prochain premier ministre, Yair Lapid etle reste. Ils sont encore pires que l’extrê-me-droite, car ils se sentent bien dansleur peau, ils sont si humains, univer-sels, avec un tel sens moral. L’extrême-droite au moins ne se cache pas. oui,nous sommes des fascistes, disent-ils.Quel mal y-a-t-il ? nous sommes juifset avons le droit de l’être, car noussommes le peuple élu, nous en avonsle droit et personne ne peut nous direce que nous devons faire. (NDLR :souligné par nous).

    Quand arrive le tour du centregauche, comme on l’appelle (...), cequ’il leur reste à faire est de gauche.(…) Vous vous sentez si bien avecvous-mêmes, vous n’êtes pas des fas-cistes, vous n’êtes pas de ces nationa-listes racistes, vous êtes progressistes.Mais l’occupation doit se poursuivreet l’enfant, Ahmad Tamimi, doit res-ter en prison pour toujours et lescrimes doivent continuer car nousn’avons pas d’autre option, ce quim’amène à l’ensemble de valeurs qui,pour moi, constitue le noyau de lasociété israélienne, actuellement, troisou quatre ensemble de valeurs, quiexpliquent tout selon moi.

    Nous sommes le peuple élu

    Cette première valeur bien enraci-née, admettons-le. Séculiers et reli-gieux y croient même s’ils ne lereconnaissent pas. Son applicationest simple : si nous le sommes, qui vanous dire ce que nous devons faire ?Qui êtes-vous ? (...). Le droit interna-tional, chose merveilleuse qui nes’applique pas à nous, qui s’appliqueailleurs, pas à Israël, peuple élu. Vousne comprenez pas ? (...)

    Nous sommes des victimes

    Cette deuxième valeur est, tou-jours bien ancrée. Pas seulement desvictimes importantes, mais les seulesvictimes. J’ai en tête de nombreusesoccupations, plus longues que cellesd’Israël, plus brutales, même s’ildevient de plus en plus ardu d’êtreplus brutale que l’occupation israé-lienne. Je ne me souviens pas d’uneoccupation où l’occupant se soit pré-

    senté comme une victime, pas seule-ment une victime, mais la seule (…).Golda Meir, je la cite, avait dit que"nous ne pardonnerons jamais auxArabes de nous obliger à tuer leursenfants". Nous sommes les victimeset sommes obligés de les massacrer -pauvres de nous - . En tant que victi-me et seule victime de l’histoire,nous avons le droit de faire ce quenous voulons (…).

    Les Palestiniens ne sontpas des êtres humainscomme nous

    C'est la troisième conviction, siprofondément ancrée, qu’elle en estdevenue un credo, encore une fois nié.Mais si vous grattez sous la peau detout un chacun en Israël, vous la trou-verez. (...). Ils n’aiment pas leursenfants comme nous. Ils n’aiment pasla vie comme nous. Ils sont nés pourtuer. Ils sont cruels. Ils sont sadiques.Ils n’ont pas de valeur, pas demanières. Regardez comme ils noustuent. Cela est très profondément ins-tallé dans la société israélienne et c’estlà, peut-être, la question essentielle,car aussi longtemps qu’elle persistera,rien ne changera. Aussi longtempsque la majorité des Israéliens ne per-cevra pas les Palestiniens comme desêtres humains à part entière - noussommes tellement meilleurs qu’eux -nous sommes si développés, noussommes si humains, plus qu’eux. (...)Vous avez donc une société convain-cue de sa justice, avec peu d’interro-gations. Quiconque ose soulever unequestion de manière systématiqueest immédiatement gommé, démoli.C’est incroyable comme ce méca-nisme fonctionne en Israël.

    Ecraser toute critique, telle est l'in-tention des dirigeants israéliens etdes médias

    Nous parlons ici de l’efficacité dulobby juif, ainsi appelé en IsraëlBreaking the Silence (Brisons lesilence). Pendant des années, nousavons rêvé du jour où les soldats selèveront pour dire la vérité, pasGidéon Lévy, le menteur, le traîtrequi vous raconte toutes sortes d’his-toire sur les crimes israéliens. Non.Des soldats qui ont commis descrimes, viendront en témoigner.

    Courrier du CVPR, n°69 - p. 6

    ISRAËL

  • Voici, plus de 1000 témoignages desoldats qui, avec courage, ont appor-té leur version de ce qu’ils faisaient,depuis des années, dans les territoiresoccupés. Dans une société saine, celaeut été un raz-de-marée, une tempête.Nos fils ? Comment cela se fait-il ?Rien. Breaking the Silence a été aussitôt délégitimisé par le systèmepolitique avec la collaboration habi-tuelle des médias. Je crains que cetteorganisation ne soit totalement écra-sée, mais c’est juste un exemple.

    La société israélienne, surtout cesdernières années, a l’intention fermed’écraser toute critique qu’elle soitinterne comme externe, à travers salégislation, ses campagnes, la presse.Et ce n’est que le commencement. Decette manière, je peux dire qu’il y aune légère différence entre la soitdisant gauche et la droite car la pre-mière a un semblant d’engagement,au moins envers la démocratie pourles juifs, puisque, comme vous devezle savoir, Israël est le seul endroit aumonde où il y a trois régimes.

    L’un est la prétendue démocratiepour les citoyens juifs, qui, malgré sesfailles, fonctionne toujours. J’ai unetotale liberté en Israël, cela doit êtredit, ici. J’écris ce que je veux, j’appa-rais à la télévision, je ne peux accuserque l’on me fasse taire, sauf les gensdans la rue qui n’aiment pas me voir,me crachent dessus, me menacent.Mais, au bout du compte, cette libertéque je n’estime pas acquise et nedurera pas, elle est là. Voilà le premierrégime sur le devant de la scène.

    Puis vient le second régime : unrégime très discriminatoire envers lesPalestiniens. Les Palestiniens de « 48 », citoyens israéliens, 20% de lapopulation, qui sont discriminés detoutes les manières, même s’ils possè-dent des droits civils égaux. Ils peu-vent voter, sont éligibles, ils peuventêtre élus, on peut voter pour eux.

    Le troisième régime que, de touteévidence, Israël veut dissimuler estl’occupation militaire, le régime mili-taire des territoires occupés. Je mepermets de dire ici que, sans douteaucun, il est la tyrannie la plus bruta-le, la plus cruelle de la terre. Pasmoins que cela. (...). Comment peut-on affirmer qu’Israël est la seule

    démocratie au Moyen-orientquand, dans son arrière-cour, ilexiste une tyrannie des pluscruelles et brutales ? Commentpouvez-vous être à moitié démo-cratique ? Comment pouvez-vousêtre à moitié enceinte ? Pouvez-vous être démocratique en façadeet une tyrannie, en coulisse ?(NDLR : souligné par nous)

    Se présente alors le mensonge quenous devons combattre, que tout esttemporaire. Non, mes amis, le tempo-raire n’a jamais été envisagé. Cen’est pas temporaire, et ne sera pastemporaire si cela dépend d’Israël. Iln’y a jamais eu aucun hommed’Etat israélien, ayant un posteimportant et influent, premierministre ou autre, qui ait véritable-ment cherché à terminer l’occupa-

    tion - aucun. (NDLR : souligné parnous). Certains voulaient gagner dutemps afin de consolider l’occupa-tion. D’autres encore cherchaient àgagner du temps grâce à des accordsintérimaires simplement pour gagnerdu temps. D’autres aussi voulaientêtre reconnus dans le monde, êtreétreints comme des hommes de paix.Mais aucun d’eux n’avait l’intentiond’en finir avec l’occupation.Comment le savez-vous ? Je ne saispas ce qui est dans leurs cœurs ; je nesais qu’une chose, à savoir qu’Israëln’a eu de cesse d’établir des colonies.Si on construit une maison dans lesterritoires occupés, on n’a pas l’in-tention de mettre fin à cette occupa-tion et ces bluffs doivent cessés.

    * Source : Information Clearing House –extraits (7/3/18)* - Traduction et Synthèse : Xavière Jardez

    ISRAËL

    Ce que les combattants juifs de1948 disent sur la nakba

    par Thomas VaSCoVI

    Si, officiellement,Israéliens et Palestinienss’écharpent au sujet desévénements de 1948 qui ont conduit 805 000 arabes à l’exilforcé, en pratique, descombattants juifs ont trèstôt témoigné des crimesdont ils ont pu être complices, voire auteurs

    P our les Israéliens, 1948 incar-ne l’heure de gloire du projetsioniste, le moment où les juifsreviennent dans les pages de l’Histoirecomme des acteurs de leur destin et,surtout, parviennent à réaliser l’utopieémise 50 ans plus tôt par TheodorHerzl : l’édification, en Palestine, d’unÉtat refuge pour le « peuple juif ».

    Pour les Palestiniens, 1948 sym-bolise l’avènement du processuscolonial qui les a dépossédés de leurterre et de leur droit à la souveraine-té, leur « Nakba » (catastrophe).

    Les premières voix dissonantes

    Par différents biais, certainsIsraéliens ont, dès le lendemain de1948, témoigné des événements pas-sés. Durant le conflit, certains cadresdu mouvement sioniste interpellent ladirection au sujet du traitement de lapopulation arabe de Palestine, qu’ilsjugent indigne des valeurs que lescombattants juifs prétendent défendre.D’autres prennent des notes pour espé-rer témoigner dès que le feu aura cessé.

    Yosef Nahmani, officier supérieurde la Haganah, la force armée del’Agence juive qui deviendra l’armée

    Courrier du CVPR, n°69 - p. 7

    DR

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  • d’Israël, écrit ainsi dans son journal, endate du 6 novembre 1948 : « À Safsaf,après […] que les habitants eurenthissé le drapeau blanc, [les soldats] ontrassemblé les hommes et les femmesséparément, ligoté les mains de cin-quante ou soixante villageois, et les ontabattus et tous enterrés dans une mêmefosse. Ils ont également violé plusieursfemmes du village. […] Où ont-ilsappris un comportement aussi cruel,pareil à celui des nazis ? […] Un offi-cier m’a raconté que les plus acharnésétaient ceux qui venaient des camps. »

    En réalité, dès que la guerre prendfin, le récit du vainqueur s’impose et lasociété civile israélienne fait face à denombreux autres défis, bien plusurgents que le sort des réfugiés palesti-niens. Ceux qui souhaitent témoignerle font par la fiction et la littérature.

    L’écrivain et homme politiqueisraélien Yizhar Smilansky publie ainsidès 1949 Khirbet Khizeh, où il évoquel’expulsion d’un village arabe éponyme.Pour l’auteur, nul besoin d’avoir deremords sur cette part de l’histoire, ce« sale boulot » était nécessaire pourbâtir le projet sioniste. Son témoignagereflète une sorte d’expiation despéchés : reconnaître ses torts et lesdévoiler pour se libérer d’un poids.

    Devenu un best-seller, le romanest adapté en téléfilm en 1977 mais sadiffusion suscite de vifs débats car ilremet en cause la version israélienned’un peuple palestinien parti volon-tairement de ses terres pour ne pasvivre aux côtés des juifs.

    D’autres ouvrages sont publiés,mais peu font autant preuve de réalis-me que la trilogie de Netiva Ben-Yehuda, publiée en 1984, dont le titretraduit de l’hébreu est « Le chemin desliens : roman sur trois mois en 1948 ».Commandante du Palmah, l’unitéd’élite de la Haganah, elle évoque lesexactions et les humiliations commisessur la population arabe et livre des élé-ments sur le massacre d’Ein Zeintoun,qui eut lieu autour du 1er mai 1948.

    La focalisation sur Deir yassin

    Le 4 avril 1972, le colonel MeirPilavski, membre du Palmah, seconfie dans les colonnes de YediotAharonot, l’un des trois plus grands

    quotidiens israéliens, sur le massacrede Deir Yassin, qui eut lieu le 9 avrilet où près de 120 civils perdirent lavie. Il affirme que ses hommesétaient à proximité des événementsmais qu’il leur fut conseillé de se retirer lorsqu’ils comprirent que lesmiliciens de l’Irgoun et du Stern, desgroupes d’ultras qui avaient fait scission de la Haganah, étaient à lamanœuvre.

    Les débats vont se focaliserautour des événements de DeirYassin, au point d’oublier les près de70 autres tueries de civils arabes.L’enjeu est important pour la gauchesioniste : placer la responsabilité desmassacres sur des groupes d’ultras.

    En 1987, lorsque paraissent lespremiers ouvrages des « nouveauxhistoriens » israéliens tels qu’IlanPappé, une partie considérable desbataillons juifs de 1948 sont mis encause. Pour celles et ceux qui s’étaienttus durant les dernières décennies, ilest temps de parler publiquement.

    Une partie de la société israéliennesemble également prête à entendre.Dans un contexte de première Intifadapalestinienne et de négociations pré-Oslo, les milieux pacifistes entendentinterroger leur société sur leur rapportà l’Autre et à l’histoire nationale.

    Ces espaces d’échanges se refer-ment brutalement avec le déclenche-ment de la seconde Intifada, plusmilitarisée et qui s’inscrit dans uncontexte d’échec des pourparlers decamp David et de rupture des négocia-tions israélo-palestiniennes. L’affaireTeddy Katz incarne ce changement decontexte.

    L’« affaire »Teddy Katz

    Kibboutznik de 60 ans, TeddyKatz décide en 1985 de reprendre sesétudes et s’inscrit dans un parcoursde recherche historique sous la direc-tion d’Ilan Pappé, à l’universitéd’Haïfa. Il souhaite éclairer les évé-nements qui se sont déroulés danscinq villages palestiniens, dépeuplésen 1948. Il compile 135 entretiens decombattants juifs, dont 65 qui seconcentrent sur la tragédie qui auraiteu lieu dans le village de Tantoura,vidé de ses 1 200 habitants le 23 mai1948 par un bataillon du Palmah.

    Après deux ans de recherche,Katz affirme dans ses travauxqu’entre 85 et 110 hommes ont étéfroidement abattus sur la plage deTantoura, après avoir creusé leurspropres tombes. La tuerie se poursuitensuite dans le village, maison parmaison. Une chasse à l’homme sejoue également dans les rues. Lemassacre cesse avec l’interventiond’habitants juifs du village voisin deZikhron Yaakov. Au final, plus de230 personnes sont assassinées.

    En janvier 2000, un journaliste deMaariv décide de retourner voir cer-tains des témoins que mentionneKatz. Le principal témoin, BentzionFridan, commandant du bataillon duPalmah qui a opéré à Tantoura, nietout en bloc et, avec d’autres gradés,porte plainte contre Katz. Celui-cidoit faire face à une dizaine d’avocatsdécidés à défendre l’honneur des « héros » de la nation.

    […] la version palestinienne de1948 n’intéresse plus les pacifistesisraéliens, trop occupés pour la plu-part à rentrer dans le rang pour ne pas

    subir la condamnation d’unesociété refermée sur elle-même.

    Sous la pression média-tique – qui parle de luicomme d’un « collabo » quirelaie la version de l’ennemi– et judiciaire, il accepte designer un document recon-naissant avoir falsifié les

    témoignages. Bien qu’il décidequelques heures plus tard de se rétrac-ter et qu’une commission universitai-

    Courrier du CVPR, n°69 - p. 8

    Photo extraite du film tiré du roman Khirbet Khizehmontrant une brigade de combattants juifs pendantla Nakba (Wikipedia)

    DR

    ISRAËL

  • Courrier du CVPR, n°69 - p. 9

    re ait plaidé en sa faveur, la procédu-re judiciaire se termine.

    Entre l’effondrement d’Oslo, leretour au pouvoir du Likoud, l’échecdes négociations de Camp David et deTaba, la seconde Intifada et les atten-tats kamikazes, la version palestinien-ne de 1948 n’intéresse plus les pacifistes israéliens, trop occupés pourla plupart à rentrer dans le rang pourne pas subir la condamnation d’unesociété refermée sur elle-même.

    Témoigner pour la postérité

    En 2005, le réalisateur Eyal Sivan etl’ONG israélienne Zochrot développentle projet Towards a Common Archivevisant à collecter les témoignages decombattants juifs de 1948. Près d’unetrentaine acceptent de témoigner, sanstabou ou presque, sur ce qu’ils ont faitet vu durant cette période riche en évé-nements et où les récits s’affrontent.

    Pourquoi des combattants accep-tent-ils de témoigner quelques annéesplus tard ? Pour Pappé, directeur scien-tifique du projet, il y a trois raisons.

    Premièrement, la plupart arriventà la fin de leur vie et ne craignentdonc plus de parler.

    Deuxièmement, ces ex-combattantsconsidèrent qu’ils se sont battus pourun idéal qu’ils voient se détériorer avecla montée en Israël des milieux reli-gieux, de l’extrême droite et du chocnéolibéral imposé par Netanyahoudurant ses mandats successifs.

    Troisièmement, ils sont persuadésque tôt ou tard, les jeunes générationsapprendront l’origine des réfugiéspalestiniens et ils pensent que la trans-mission de cette histoire gênante faitpartie de leur responsabilité.

    Les témoignages de ces combat-tants ne sont pas homogènes. Certainsse livrent explicitement quand d’autresne souhaitent pas aborder certainssujets. Néanmoins, si tous se rejoignentsur la nécessité, en 1948, d’expulser lespopulations arabes pour bâtir l’Étatd’Israël, leurs avis s’opposent parfoissur l’utilité des tirs sur les civils.

    1 juin 2018

    À LIRE � Ilan Pappé : « LaNakba, un crime observé, ignorémais pas oublié »

    La Palestine rejoint deux instances del'onU

    L a Palestine, déjà membre de l'Unesco depuis 2011 au grand dam desEtats-Unis, a rejoint deux nouvelles agences de l'ONU, a indiqué mer-credi au Conseil de sécurité le coordonnateur des Nations unies pour le

    Proche-Orient, Nickolay Mladenov.

    "Le 15 mai, la Palestine a adhéré à la Conférence des Nations unies sur le

    commerce et le développement (Cnuced)" et "à l'Organisation des Nations

    unies pour le développement industriel (Onudi)", a précisé Nickolay

    Mladenov, coordonnateur des Nations unies, lors d'une réunion mensuelle

    du Conseil de sécurité sur le Proche-Orient. Il a aussi rappelé que la

    Palestine avait rejoint la Convention sur l'interdiction des armes chimiques

    (OIAC) basée à La Haye. Cette adhésion avait été au préalable annoncée

    aux Pays-Bas par un communiqué mercredi de l'OIAC, précisant que la

    Palestine en était devenue "le 193e Etat signataire".

    Voir : https://www.lexpress.fr/actualite/monde/ proche-moyen-orient/la-palestine

    rejoint-deux-instances-de-l-onu_2011080.html

    Les Palestiniens misent sur la justice internationale

    Photo du président palestinienMahmoud Abbas, prise le 3 février 2018 à Ramallah lorsd'une réunion du comité exécu-tif de l'Organisation de libéra-tion de la Palestine (OLP)afp.com/ABBAS MOMANI

    L e gouvernement palestinien ademandé à la procureure dela CPI d’ouvrir une enquête.Selon lui, elle devrait porter sur descrimes commis depuis 2014 à Gazaet dans les territoires occupés.

    Face à Israël, le gouvernementpalestinien a choisi de recourir à unarbitre encore peu sollicité au Proche-Orient : la justice de La Haye. Parvoie officielle, il a demandé à la Courpénale internationale (CPI), le 22 mai,d’« ouvrir immédiatement une enquê-te » sur des crimes de guerre et contrel’humanité commis à l’encontre deses compatriotes. Leurs responsables« doivent rendre des comptes pourleurs actions sans délai supplémen-taire », a plaidé le ministre de la justi-ce, Riyad Al Maliki, qui avait fait ledéplacement au siège de la CPI.

    62 manifestants de la bandede Gaza tués

    Parmi ces crimes figure la prise pourcible de « manifestants non armésdans la bande de Gaza », a indiqué leministre. Une référence aux 62 mani-festants de la bande de Gaza tués pardes tirs de soldats israéliens, le 14 mai dernier, alors qu’à Jérusalem,les États-Unis inauguraient leur nou-velle ambassade.

    Mais la demande palestinienne nes’en tient pas là. Mentionnant la colo-nisation, « menace la plus dangereu-se envers la vie et les ressources desPalestiniens », elle porte sur tous lescrimes qui auraient été commisdepuis juin 2014, début de la compé-tence de la CPI sur le dossier.

    DR

    PALESTINE

  • L’État hébreu ne reconnaîtpas les règles de la CPI

    Un écho favorable, à La Haye, decette mise en accusation de la poli-tique de l’État hébreu susciterait sonire. « Nous ne permettrons pas que lessoldats et les officiers de Tsahalsoient traînés devant le tribunal de LaHaye », avait prévenu BenyaminNetanyahou, le premier ministre, lorsde l’adhésion de l’Autorité palesti-nienne (AP) à la CPI, en janvier 2015.

    À l’époque, son accueil à LaHaye représentait un doublecamouflet pour Israël : il reve-nait à attribuer le statut d’État àl’AP et ouvrait la porte àd’éventuelles poursuites judi-ciaires car, si Israël n’a pas rati-fié le statut de la CPI (de mêmeque les États-Unis), celles-cisont toutefois rendues possiblespar la nationalité des victimes.

    L’État hébreu ne reconnaît cepen-dant pas ces règles. « La CPI n’a pasautorité sur la question israélo-pales-tinienne puisque Israël n’est pasmembre de la Cour et puisquel’Autorité palestinienne n’est pas unÉtat », a réagi, mardi 22 mai, le minis-tère israélien des affaires étrangères.

    La CPI compétente sur le sujet

    Le Proche-Orient fait néanmoinspartie de longue date des préoccupationsde la procureure de La Haye. Depuis

    2015, Fatou Bensouda épluche des rap-ports sur les expulsions et les construc-tions en Cisjordanie occupée et àJérusalem-Est, annexé par l’État hébreu.Elle décortique les discriminationssubies par les Palestiniens et analysele contexte de la mort de quelque 1 000 civils durant la dernière guerreentre le Hamas et l’État hébreu, en juillet2014. Objectif de cet « examen prélimi-naire », nourri par une centaine de rap-ports souvent réalisés par des ONG :déterminer si les critères sont remplispour l’ouverture d’une enquête.

    Parmi les conditions, la gravité descrimes, qui doivent s’apparenter à descrimes de guerre et contre l’humanité,ou encore la « complémentarité ». « Ilfaut démontrer qu’aucune procédurevisant effectivement à lutter contrel’impunité n’est en cours devant lesjuridictions nationales et que, si desprocédures existent, celles-ci ne visentpas les plus hauts responsables, lesseuls que puisse poursuivre la CPI,explique Karine Bonneau, respon-sable justice internationale à laFédération internationale des droitsde l’homme (FIDH). Mais d’après

    nous, il n’y a pas d’obstacle à la com-pétence de la CPI sur ce sujet. »

    Un dossier extrêmementsensible

    Autre critère : l’« intérêt de la jus-tice ». « En d’autres termes, il fau-drait démontrer que la justice n’en-trave pas le processus de paix »,poursuit Karine Bonneau. Une appré-ciation politique facilement contes-table par les détracteurs de la CPI.

    Signe de l’extrême sensibilité dudossier, Fatou Bensoudan’a pas encore tranchéaprès trois ans d’« examenpréliminaire ». Son engage-ment ne fait pourtant aucundoute aux yeux des ONG. « Il y a une vraie dynami-que, les ONG ont eu beau-coup de réunions avec lebureau de la procureure »,confie Karine Bonneau. De

    fait, la procureure s’est saisie de lasituation quinze jours seulement aprèsl’adhésion palestinienne à la CPI.

    La requête introduite du gouver-nement palestinien, mardi 22 mai, dis-pense Fatou Bensouda du feu vert desjuges et peut donc, en théorie, accélé-rer le lancement d’une enquête. Sicelle-ci était ouverte, elle n’épargne-rait pas plus les responsabilités présu-mées côté israélien que palestinien.

    Voir : http://www.france-palestine.org/Les-Palestiniens-misent-sur-la-justice-internatio-nale?destination=imprimer

    Courrier du CVPR, n°69 - p. 10

    L’onU condamne l’usage excessif de la force parIsraël à Gaza

    L’Assemblée générale des Nations unies (ONU),réunie en urgence, a adopté mercredi 13  juin à uneforte majorité un projet de résolution condamnantl’usage excessif de la force par Israël contre les civilspalestiniens lors de la flambée de violences meur-trières à Gaza. Elle demande, en outre, au secrétairegénéral, Antonio Guterres, de recommander la mise enplace d’un « mécanisme de protection internationale »dans les territoires occupés. Un tel mécanisme a cepen-dant peu de chance d’aboutir puisqu’il doit être validé

    par le Conseil de sécurité de l’ONU, où les Etats-Unisdisposent du droit de veto.

    Le texte présenté par l’Algérie, la Turquie et l’Autoritépalestinienne a été adopté par 120 voix pour, huit contre et45 abstentions. Les Etats-Unis avaient mis leur veto à unerésolution similaire il y a deux semaines au Conseil de sécu-rité. La résolution condamne, en outre, les tirs de roquettede la bande de Gaza vers l’Etat hébreu mais ne mentionnepas nommément le Hamas, qui contrôle l’enclave.

    DR

    PALESTINE

  • Courrier du CVPR, n°69 - p. 11

    dossier

    J e n'ai pas les éléments suffisantssous la main pour le faire, mais jesouhaite qu'un autre réalise une étudeDu Bund à Netayahou ou la décaden-ce juive.

    Comment cette communauté, quia fourni quelques uns des hommesqui ont le plus honoré notre espèce,de Maimonide à Chagall, de Spinozaà Mendelssohn, de Heine à Freud etEinstein, et combien d'autres, peutelle être déshonorée par les agisse-ments honteux d'une équipe de diri-geants extrémistes qui croient proté-ger la population d'un Etat expan-sionniste, ne tenant aucun compte dudroit international, derrière un mur,comme une sorte de ghetto inversé.La répression, disproportionnée, desPalestiniens est une voie tragique,sans issue, qui ne mène à rien. "Unpeuple qui en opprime un autre nesaurait être un peuple libre" a ditavec justesse Karl Marx.

    Quant à Jérusalem, ville trois fois sainte et trois fois maudite, elle ne peutrelever que d'un statut international, neutre, dans une sorte d'oecuménismeaussi bien civil que religieux. L'argument de force - violences, massacres - n'estpas un argument. On l'a vu en Afrique du Sud.

    olonne le 19 mai 2018 jean-Paul Lewidoff - membre du CVPR PO.

    La "Grande marche du retour"

    je vais bientôt disparaître sans avoir compris comment certains juifs, de persécutés sesont faits persécuteurs (comme je n'ai pas compris que des résistants patriotes françaisaient pu se muer en défenseurs d'un colonialisme dépassé dans les guerres salesd'Indochine et d'Algérie).

    Le joUr de LA honte

    Ce lundi sanglant, lorsquele nombre de Palestinienstués et blessés augmentaitheure après heure, je mesuis demandé ce que j’aurais fait si j’avais étéun jeune de 15 ans de la

    A u souvenir de cet événement quieut lieu il y a 79 ans, il m’estvenu à l’esprit que les garçonsde Gaza sont de plus grands héros quenous ne l’étions. Ils ne se sont pasenfuis comme nous l’avons fait. Ils sontrestés pendant des heures, tandis que lenombre des morts augmentait à 61 etque le nombre des blessés atteignait

    1500 en plus des 1000 atteints par lesgaz. Ce jour-là la plupart des chaînes detélé en Israël comme à l’étranger ontpartagé leur écran en deux . A droite, lesévénements à Gaza, à gauche l’inaugu-ration de l’ambassade des Etats-Unis àJérusalem. (...)

    Jérusalem est une pierre d’achop-pement. Chacun sait qu’il n’y aura pasde paix, ni maintenant, ni jamais, sansun compromis à son sujet. (...)Jérusalem est le troisième lieu saint del’Islam. Pour les Juifs, naturellement,Jérusalem est le lieu où, il y a plus de2 000 ans se trouvait le templeconstruit par Hérode, un demi-juifcruel. Le reste d’un mur extérieur esttoujours en place et est vénéré commele « mur ouest » souvent appelé le"Mur des Lamentations". Il constituele lieu le plus sacré pour les Juifs.

    Des dirigeants ont essayé de trou-ver une solution. Le comité des

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    Bande de Gaza ? Sanshésitation, j’aurais manifesté le long de lafrontière risquant ma vieà chaque instant.Comment en suis-je sûr ?C’est simple : j’ai fait lamême chose quandj’avais 15 ans (...)Uri Avnery

  • Nations Unies qui, en 1947, a décré-té la partition de la Palestine en deuxEtats, l’un arabe et l’autre juif, unesolution assumée par le leadershipjuif. Il a suggéré de séparer Jérusalemdes deux Etats et d’en faire une unitéséparée à l’intérieur de ce qui étaitsupposé être une sorte de fédération.(...) Personne n’aimait la division dela ville. Aussi, mes amis et moimirent au point une troisième solu-tion, qui aujourd’hui, fait l’objet d’unconsensus universel : garder la villeunifiée au niveau municipal et ladiviser politiquement : l’Ouest entant que capitale d’Israël et l’Est de laPalestine. (...)

    Si le Président Donald Trumpavait déclaré Jérusalem-Ouest capita-le d’Israël et y avait déplacé sonambassade, pratiquement personnene se serait ému. Mais en omettant lemot « Ouest », Trump a allumé unincendie. Peut-être sans même réali-ser ce qu’il était en train de faire, etprobablement sans y prendre garde.Pour moi, le déplacement de l’am-bassade des Etats-Unis ne signifierien. C’est un acte symbolique qui nemodifie pas la réalité. (...)

    Ils étaient là, cette poignée de nul-lités gonflés de leur propre importan-ce, Israéliens, Américains, en train deprofiter de leur petit festival, tandisque des rivières de sang coulaient àGaza. (NDLR : souligné par nous).Des êtres humains étaient tués pardizaines, et blessés par milliers.Lorsque la dernière embrassade futéchangée, et le dernier complimentachevé, Gaza est restée ce qu’elleétait, un vaste camp de concentrationdotée d’hôpitaux surpeuplés, man-quant de nourriture et de médica-ments, d’eau potable et d’électricité.

    Une ridicule campagne mondialede propagande a été propagée pourcontrer la condamnation mondiale.Par exemple : le Hamas terroristeavait obligé les Gazaouis à manifes-ter. Comme si quelqu’un pouvait êtrecontraint d’aller risquer sa vie dansune manifestation. Ou bien, cetteautre version selon laquelle le Hamasdonnait 50 dollars à chaque manifes-tant.(...) Ou cette histoire selonlaquelle les soldats n’avaient pasd’autre choix que de les tuer parcequ’ils prenaient d’assaut la clôturequi marque la frontière. En réalité,personne ne l’a fait – l’énorme

    concentration de forces armées israé-liennes les en auraient facilementempêchés sans avoir à tirer.

    Presque oubliée, une petite infor-mation parue dans les jours qui ontprécédé : le Hamas avait discrète-ment proposé une Hudna de dix ans.Une Hudna est un armistice sacré,qui ne peut se rompre. Les Croisés,nos lointains prédécesseurs, ontbénéficié de plusieurs Hudnas avecleurs ennemis arabes durant les deuxsiècles de leur présence ici. Les diri-geants israéliens ont immédiatementrejeté l’offre.

    n'est pas arrivé. Peut-être étaient-ils enétat de choc. Le jour suivant, les jeunesdes groupes pacifistes ont manifestéface au bureau du Likoud à Tel-Aviv.Au nombre d’à peu près 500. Loin, trèsloin des centaines de milliers qui ontmanifesté il y a quelques années contrele prix du fromage blanc. (...)

    Mais ce qui a couronné le tout c’estl’énorme entreprise de lavage de cer-veau qui s’est mise en mouvement. Jen’en avais jamais connu de telle.Presque tous les soi-disant « correspon-dants de guerre » se sont comportéscomme des agents militaires de propa-

    Courrier du CVPR, n°69 - p. 12

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    Alors pourquoi les soldats avaient-ils l’ordre de tuer ? La même logique aanimé maints régimes d’occupation àtravers l’Histoire. Il s’agit de faire sipeur aux indigènes qu’ils abandon-nent. hélas, les résultats ont presquetoujours été à l’exact opposé : lesopprimés se sont renforcés, sontdevenus plus résolus. C’est en traind’arriver maintenant. (NDLR : sou-ligné par nous). Il est possible, qu’àl’avenir, le lundi sanglant soit consi-déré comme le jour où, les Palestiniensont retrouvé leur fierté nationale, leurvolonté de se redresser et de combattrepour leur indépendance. (...)

    Je me serais attendu à ce que tousles écrivains israéliens de renompublient une condamnation éclatanteau moment même de la fusillade. Celane s’est pas produit. L’opposition poli-tique fut indigne. Aucun mot de la partdes travaillistes. Aucun mot de la partde Yair Lapid. Le nouveau leader duMeretz, Esther Sandberg, a au moinsboycotté la célébration de Jérusalem.Les travaillistes et le Meretz ne l’ontmême pas fait. J'aurais attendu desdizaines de nos braves organisations depaix qu'elles s'unissent pour une actionspectaculaire de condamnation (...) Ce

    gande. Jour après jour, ils ont aidé l’armée à propager des mensonges etdes falsifications. De même pour tousles autres moyens de communication,présentateurs de programmes ; annon-ceurs, et correspondants. Ils sont de leurplein gré devenus des menteurs gouver-nementaux. Il est probable que beau-coup d’entre eux ont reçu des ordres deleurs supérieurs. Pas glorieux.

    Après le jour du sang, alors quel’armée était face à une condamna-tion universelle et devait arrêter detirer (en tuant seulement « deux »manifestants) tous les médias se sontunis pour déclarer que c’était unegrande victoire israélienne. Israël adu ouvrir les passages et envoyernourriture et médicaments à Gaza.L’Egypte a du ouvrir le passage versGaza et accepter plusieurs centainesde blessés en vue d’être opérés et derecevoir des traitements.

    Le jour de la Honte était terminé.Jusqu’à la prochaine fois.

    Gush ShALom, 19 mai 2018 - Extraits de l’articletraduits par D Vincent-Séraphin

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  • Je ne peux te qualifiercomme criminel en tantque peuple ni en tant quel’ensemble des citoyens del’État, mais je ne peuxrenoncer à qualifier ainsiton gouvernement, entoutes lettres : criminel,assassin, génocide. C’estune ignominie pour toiqu’il te représente auxyeux du monde, mais tu esresponsable d’avoir élu etde maintenir à son postecelui qui le dirige.

    I ls sont nombreux en ton sein lescitoyens – Arabes et juifs – toutcomme les mouvements sociauxqui dénoncent ses crimes, le vol sys-tématique des meilleures terres etsources de Palestine, la parcellisationcruelle de son territoire, les fonda-tions toutes puissantes de colonies,les murs honteux et les barbelés éri-gés, avec l’excuse facile et fausse dela sécurité, les contrôles humiliantsauxquels ils soumettent lesPalestiniens, le terrifiant ghetto danslequel ils les ont enfermés, la terribledisproportion entre ses violentesreprésailles et la réponse violente, àchaque fois plus compréhensible, debeaucoup de Palestiniens désespérés,expulsés de leurs terres ou prison-niers d’elles sans eau ni électricité...

    Il ne s’agit pas decrimes commispar un mouve-ment terroristeincontrôlé, maisde la terreurexercée impuné-ment par votreÉtat, conforté parsa supériorité mi-litaire, avec le sou-tien incondition-nel de son alliéaméricain et parles conflits inter-

    nes de ses adversaires arabes etmusulmans. Ils sont nombreux ceuxde votre peuple qui s’opposent à toutcela, mais ils ne sont pas assez, ils nesont pas la majorité, ils n’arriventmême pas à constituer une minoritéforte. Vous ne pouvez éluder votreresponsabilité collective. Je ne parlepas de responsabilité juridique, jeparle de responsabilité éthique, deton devoir communautaire incontour-nable devant une injustice et unesouffrance de telles dimensions.

    Le soulèvement contre ton gouverne-ment est entre tes mains, non seulementle dénoncer à grands cris devant toutesles instances, mais aussi le déloger partes votes. Toi, peuple admirable et admi-ré, créateur de tant de culture, et toi qui àcause de ton ethnie ou de ta religion asété victime de tant de violences, expul-sions et assassinats, toi qui as souffertl’holocauste, comment peux-tu main-tenir au pouvoir ton gouvernement ettolérer qu’il commette avec les Pales-tiniens des crimes semblables à ce quia été commis envers toi ? (NDLR : sou-ligné par nous).

    rÉPondS. reBeLLe-toI

    Évidemment, les Palestiniens euxaussi doivent assumer leurs responsa-bilités pour endosser votre histoire,votre drame indissociable, et construi-re un futur ensemble, avec une capi-tale également partagée. Mais la cléprincipale est entre tes mains.Reconnais que la création de votreÉtat indépendant en 1948 ne serajuste que le jour où se réparera l’in-

    justice perpétrée contre le peuplepalestinien, et que seront rendues lesterres conquises en 1967 et que tuauras trouvé une solution pour sesréfugiés. Ce jour-là seulement ta fon-dation cessera d’être la Nakba (« catastrophe ») de Palestine, et seu-lement alors, tu seras en sécurité.

    Écoute les décisions des NationsUnies, aussi pathétiques et inopé-rantes soient-elles si souvent, sou-mises aux vetos et désactivéescomme elles le sont par le pouvoiraméricain, ton arrogant ami Goliath,ennemi de la planète. Écoute tespropres prophètes d’hier et d’aujour-d’hui. Écoute les paroles adressées àCaïn par la voix de – Celui qu’on nepeut nommer – dans la reprise de laGenèse biblique, le premier livre deta Torah, ta loi de vie : Qu’as-tu fait ?Le sang de ton frère crie vers moidepuis la terre (Gn 4, 10).Aujourd’hui ces paroles sont adres-sées à nous tous, et à toi, depuis letréfonds de la terre, la terre de tous.

    Le sang d’Abel, le juste, estaujourd’hui le sang de tes frèrespalestiniens, le sang des 108 assassi-nés par tes balles – parmi lesquels 12 enfants – lors de la récente com-mémoration palestinienne de laNakba qui eut lieu il y a 70 ans, lesang de ce bébé de 8 mois mort parinhalation de gaz lacrymogène, lesang des 12 000 blessés par tes mons-trueuses balles qui triturent l’os etdétruisent tendons, muscles, nerfs etartères. Votre Premier ministre, pen-dant ce temps, danse devant les camé-ras avec la gagnante de l’Eurovision.Où est ton frère ? demanda la Voix.Suis-je le gardien de mon frère ?répondit Caïn. Si, tu es le gardien deton frère. Réponds Israël, de tes acteset omissions, réponds de tes votes etde tes silences.

    Et n’oublie pas que DavidGrosman, un de tes plus grands écri-vains, qui perdit son fils Uri pendantla guerre de 2006 avec la milice liba-naise chiite et qui défend autant laPalestine qu’Israël, a dit récemment :« Nous ne serons réellement libresque lorsque les Palestiniens le serontaussi ».

    Source : http : //blog.periodistadigital.com/jose-arregi.php /2018/05/28.responde-israël -Traduit de l’espagnol par Rose-MarieBarandiaran

    Courrier du CVPR, n°69 - p. 13

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    rÉPondS, ISrAËLPar josé ArreGI

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  • Courrier du CVPR, n°69 - p. 14

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    Ce qUe rÉvèLe LA « marche Du retour » de GAzA

    par Asma Alghoul

    Les massacres du 14 maicommis par l’armée israélienne ont marqué lepoint culminant et dramatique de la « marchedu retour » à Gaza. Lesmobilisations ont confirméla prise de distance desPalestiniens à l’égard deleurs directions, et notamment à l’égard demahmoud Abbas. Selon lajournaliste palestinienne,ils posent les bases d’unenouvelle étape de la luttenationale.

    M aintenant que la tempêteest passée et que la pous-sière est retombée surl’apogée sanglant du lundi 14 mai àGaza, les Palestiniens n’ont plus qu’àpleurer les 110 morts (depuis le débutde la « marche du retour »), et à veniren aide aux quelque 3 000 blessés parballes réelles, balles en caoutchoucou agent de gaz lacrymogène.

    Beaucoup de ces manifestantsétaient des gens ordinaires, sans affi-liation à aucun parti ou faction, ce quia posé un problème particulier pour lesdirigeants palestiniens. Les manifesta-tions, tout en se concentrant sur lesgriefs historiques, sur le vol de leurterre il y a 70 ans par les Israéliens,

    ainsi que sur les effets du blocus impo-sé par Israël depuis dix ans, sont aussiune mise en accusation des politicienspalestiniens de tous bords. Conscientsde ce rejet, ces politiciens se sont cou-verts et ont essayé de se positionner demanière à pouvoir, en fonction durésultat des protestations, réclamer soitun crédit pour son succès soit un créditpour avoir prédit l’échec.

    Les drapeaux en berne à ramallah

    Mahmoud Abbas, le président del’Autorité palestinienne, basé enCisjordanie, a d’abord parlé de la valeurde la marche. Toutefois, lors d’uneréunion du Conseil national palestinien,à Ramallah le 30 avril, il a conseillé auxmanifestants de Gaza « d’éloigner lesenfants des balles », ajoutant : « nous nevoulons pas devenir un peuple handica-pé ». Cependant, après les massacres dulundi 14 mai, il s’est vu contraint dedéclarer une journée de deuil le 15 mai,les drapeaux de tous les bâtiments dugouvernement étant mis en berne.Leaeuple de Gaza l’avait effectivementcontraint à cette volte-face. Les militantsdes médias sociaux avaient passé unebonne partie de la journée de lundi à cri-tiquer le fait qu’il se trouvait dansl’avion, de retour de Cuba, par un jouraussi symbolique, alors que des dizainesde personnes étaient tuées à la frontière.Cela a été interprété comme une fuite.

    Le Hamas, le parti qui dirige labande de Gaza, avait pour sa part essayéde renforcer l’importance des protesta-tions — comme s’il s’agissait de la der-nière chance d’une solution pacifiqueau conflit avant une conflagrationimminente. Le 9 avril, Ismaïl Haniyeh,le chef du bureau politique du parti, aprononcé un discours à partir d’une tri-bune arborant les slogans de la marchedu retour. « Gaza entre dans une nou-velle étape de résistance pacifique etpopulaire », a-t-il déclaré, appelant à laparticipation la plus large possible.Pourtant, lors d’une conférence de pres-se, Yehya Sinwar, le leader du Hamas àGaza, avait ajouté à cela les menacesvoilées habituelles : « Quel est le pro-

    blème avec des centaines de milliers depersonnes paradant à travers une clô-ture qui n’est pas une frontière ? » Àbien des égards cependant, le Hamassavait que ce n’était pas sa bataille.Haniyeh avait essayé d’en tirer un capi-tal politique pendant le week-end du12-13 mai, prenant ostensiblement unavion militaire pour Le Caire (du jamaisvu publiquement auparavant) afin derecevoir directement les menaces dereprésailles de la bouche du principalmessager d’Israël, le gouvernementégyptien. C’était juste pour faire croirequ’il ne restait pas inactif, et prétendreque le Hamas était aux commandes.

    En réalité, le Hamas n’a pas été àl’initiative de la marche et n’a pas eud’influence sur ce que les manifes-tants ont fait. S’il se souciait vraimentdes 60 personnes tuées le 14 mai, ilaurait répondu, comme à son habitu-de, par des tirs de roquettes. Mais il acherché quand même à s’en attribuerle mérite. Le 16 mai, le responsable duHamas Salah Al-Bardawil a déclaré àla chaîne d’information palestinienneBaladna que 50 des 62 Palestinienstués au cours des deux derniers joursde la marche étaient des membres duHamas. Une affirmation ridicule, maisqui confortait non seulement le récitdu Hamas affirmant être la voix dupeuple de Gaza (et l’héritier légitimedes luttes palestiniennes), mais aussil’argument d’Israël selon lequel sonarmée ne tue que des terroristes.

    Un événement spontané

    Bien sûr, il manque l’essentiel. Ilest vrai que rien ne se passe à Gazasans que le Hamas le permette (desmanifestations organisées par lesautres forces sont régulièrement inter-dites). Mais il existe un moyen simplede distinguer une action officielleorganisée par le Hamas d’une actionqu’il ne fait que tolérer : le rôle desgroupes armés. Aucun membre desbrigades Al-Qassam, l’aile militairedu Hamas, n’a été blessé au cours dessept semaines de ces mobilisations,jusqu’à leur apogée le 14 mai. Pas unseul combattant de ces brigades n’aété tué. C’est ainsi que nous pouvonscomprendre qu’il s’agissait d’un évé-nement spontané, et non d’un événe-ment dirigé par le Hamas. Celui-ci asimplement apporté son assistanceaux manifestations ; ses militants ontfourni de l’eau et, dans certains cas,mis des bus à disposition de la popula-tion, mais beaucoup d’autres organisa-

    Photo reçue de Nurit Peled

  • tions l’ont fait également. Était-ceune initiative du hamas ? quand onsait que les brigades Al-qassam nes’y sont pas impliquées, la réponseest non. (NDLR : souligné par nous).

    Pour leur part, les gens qui seregroupaient semaine après semaineprès de la frontière ne semblaient plusécouter leurs soi-disant chefs. Lesmanifestants, souvent jeunes, sontrevenus au principe de base de laquestion palestinienne : une lutteentre la justice et l’injustice, entre lebien et le mal. Ils ne se souciaient pasqu’Abbas ait rejeté leur mouvement,ni que le Hamas essaie d’en tirer pro-fit. Ils ont marché chaque semaine deleur propre initiative. Tous les ven-dredis pendant huit semaines, puis lelundi et le mardi, des familles entièresse sont rendues à la frontière et ontorganisé des pique-niques comme s’ils’agissait de vacances, alors mêmequ’elles protestaient contre le sièged’Israël qui dure depuis une décennie.

    Au cours de la période précédantcette marche, les responsables deRamallah avaient formulé plusieurspromesses : ils débloqueraient lessalaires des fonctionnaires du gouver-nement à Gaza qui n’avaient pas étépayés depuis un mois (cela ne s’est biensûr pas concrétisé) ; et le point de pas-sage de Rafah entre Gaza et l’Égypte -que Le Caire a fermé presque tout letemps depuis 2013 pour des raisons desécurité - rouvrirait d’un jour à l’autre,ce qui fut fait finalement à la suite dumassacre du 14 mai, mais seulementpour le mois de ramadan. Il s’agissaitd’alléger les difficultés de la populationet de réduire le nombre de participantsaux manifestations, de faire en sorte queles gens aient l’impression qu’ilsavaient déjà obtenu quelque chose.Mais la tactique a échoué. Après desannées de guerre, de blocus écono-mique, de division politique interne, depauvreté et de pollution, les habitants deGaza sont devenus des experts pourdétecter les promesses vides.

    dessins, chants et vidéos humoristiques

    Il faut dire que tout au long de cesmobilisations, le Hamas a été l’objet debeaucoup moins de critiques de la partdes Palestiniens que d’habitude. Pourautant cela ne signifie pas que la popu-lation de Gaza est unie derrière lui, maisplutôt que le Hamas est déconnecté de

    la lutte que le peuple mène à la frontiè-re ; en fait, il court derrière depuis ledébut des manifestations le 30 mars.

    Les manifestants ne semblent pasavoir pris au sérieux les tentatives duHamas pour s’approprier leur protesta-tion. Au lieu de cela, ils ont inventé leurmode de résistance et de libre expres-sion. Oui, quelques personnes ont jetédes pierres ou allumé des pneus. Maispour l’essentiel, on pouvait surtout voirdes dessins, des chants, des vidéoshumoristiques et, en général, participer

    à ce qui aurait pu être un festival fami-lial. Un témoin oculaire, le photo-graphe indépendant Attia Darwish, arapporté à Orient XXI que « les forcesde sécurité du Hamas surveillaient lesmanifestations, maintenant activementla nature essentiellement pacifique desrassemblements ». Les avertissementsdu ministère de l’Intérieur du Hamas àla population en ce sens avaient été trèsclairs. Son porte-parole, Eyad Al-Bozom a même utilisé Facebook pourconfirmer ce soutien, écrivant : « Leministère de l’Intérieur sera présentaux manifestations et les soutiendradans la guerre et la paix ».

    Dans ces petites concessions etces actes de soutien, on peut voir devéritables signes que la bande deGaza pourrait gagner un avantagemoral et mener le jeu. Il s’agit depoursuivre le projet national palesti-nien et ne pas laisser le mondeoublier la cause palestinienne, des’appuyer sur le mouvement de soli-darité internationale. Et cela malgrénos ressentiments face à la violenceisraélienne et au silence international.

    Le Hamas garde toujours ses optionsouvertes, bien sûr. Lors d’une réuniondans son bureau à Gaza, le 10 mai,Sinwar a déclaré aux journalistes : « Nous voulons résoudre les problèmesde Gaza et de la Palestine par desmoyens pacifiques, mais si nous ysommes contraints, nous pouvons tou-jours recourir à la résistance armée, ceque le droit international nous donne ledroit de faire. » Ce qui est nouveau et

    significatif ici, c’est sa reconnaissance del’importance de la résistance pacifique.

    Les dirigeants palestiniens deRamallah ont manifestement laissétomber les Gazaouis. À en juger parleurs récentes déclarations, Haniyeh etSinwar cherchent à se faire passer pourles héritiers légitimes du projet nationalpalestinien. Est-ce que cela pourraitannoncer une nouvelle phase dans lalutte interpalestinienne ? Abbas et sonparti se sont moqués de la nouvelleorientation du Hamas et de ses récentes

    références à Nelson Mandela, aurévérend Martin Luther King Jr. etau Mahatma Gandhi. Saeb Erekat,un proche de Mahmoud Abbas, arépondu à Haniyeh : « Si Mandela,King et Gandhi étaient vivants, ilsseraient surpris par votre dis-cours. » Les Palestiniens ne peu-vent s’empêcher de penser que leFatah craint que sa réputation de

    parti « modéré » puisse un jour lui êtrearrachée.

    Ce changement dans l’approchedu hamas pourrait rappeler à cer-tains Palestiniens la modificationmajeure dans la constitution duhamas en mai 2017, lorsqu’il a assou-pli sa position avec un nouveau docu-ment politique acceptant un Étatpalestinien intérimaire à l’intérieurdes frontières d’avant 1967. mais lacommunauté internationale n’a guèreprêté attention à ce changement.

    Aujourd’hui, le Hamas se débarras-se des « turbans de la théocratie » - ilne prononce plus ses principaux dis-cours dans les mosquées - et emprunteplutôt les outils d’une lutte révolution-naire, laïque et populaire. Ce n’estpeut-être qu’une tentative, et il sembletoujours hésiter entre le désir de s’en-gager dans une nouvelle orientation etla crainte d’être critiqué pour sa mol-lesse à l’égard de l’ennemi. Mais déjàces protestations - en reflux depuis le14 mai -, et les quelques 110 morts, ontmontré sans ambiguïté à la vieille gardepalestinienne que la prochaine généra-tion en a assez d’une rhétorique pure-ment agressive. Elle veut nourrir toutespoir naissant pour l’avenir et éviterles erreurs des générations précédentes.

    Asma ALGhoUL

    Écrivaine et journaliste palestinienne, auteurede L’insoumise de Gaza, Calmann-Lévy,Paris, 2017.

    source:https://orientxxi.info/magazine/ce-que-revele-la-marche-du-retour-de-gaza,2474

    Courrier du CVPR, n°69 - p. 15

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    Photo

    reçue d

    e Nurit P

    eled

  • qui ont traversé de nombreusesguerres, un blocus et un siège brutal.

    La bande de Gaza abrite presque1,9 million de personnes, dont 1,2 mil-lion de réfugiés chassés de leur mai-son et de leur terre il y a 70 ans, lorsde la création d’Israël, événementconnu des Palestiniens sous le nom deNakba (catastrophe). Depuis le débutdu siège, il y a presque 11 ans, lasimple survie quotidienne a représentéun véritable défi. Se réveiller le matinen disposant d’eau salubre et d’électri-cité constitue aujourd’hui un luxe. Lesiège a été particulièrement dur pourles jeunes gens, dont le taux de chô-mage s’élève à 58 pour cent. Le pire,c’est que tout cela résulte de la poli-tique israélienne, qui pourrait êtremodifiée. Cette vie pénible et difficilene devrait pas constituer une réalitéincontournable pour la bande de Gaza.

    Les pêcheurs ne peuvent pasdépasser les six milles nautiques, et illeur est donc bien difficile de rassem-bler assez de poisson pour nourrirleur famille. Après les guerres

    menées contre Gaza par Israël, en2008-09 puis de nouveau en 2012 et2014, et tous les homicides commisdans l’intervalle, les gens d’ici ne sevoient même pas donner la possibili-té de reconstruire, car Israël a renfor-cé les restrictions imposées à l’entréedes matériaux de construction. L’étatdes hôpitaux est alarmant, et lespatients ne sont que rarement autori-sés à recevoir un traitement à l’exté-rieur de la bande. Ne parlons mêmepas de l’état d’obscurité perpétuelledans lequel nous vivons en raison del’absence quasi totale d’électricité,ou du manque d’eau propre. C’estcomme s’il n’avait pas suffi de nousdéplacer ; c’est comme s’il fallaitendiguer et effacer toute la mémoiredes réfugiés palestiniens.

    La nakba et la vie à Gaza

    Je suis né dans le camp de réfugiésde Rafah, dans la bande de Gaza. Mesparents viennent de la ville de Ramle,dans ce qu’on appelle aujourd’huiIsraël. Comme la plupart des réfugiéspalestiniens, j’ai entendu les membresles plus âgés de ma famille raconter lamanière dont ils ont été brutalementchassés de chez eux lors de la Nakba.Les décennies ont beau passer, ils fontpartie des centaines de milliers depersonnes qui ne peuvent pas oublierles horreurs dont ils ont été témoinslors de leur dépossession ni les vio-lences et les souffrances subies à cettepériode. Je n’ai jamais vu la maisonfamiliale de Ramle, et mes enfantsn’ont jamais rien vu au-delà deslimites de Gaza assiégée. L’aîné vientd’avoir 7 ans, le plus jeune a 2 ans, etla seule réalité qu’ils connaissent,c’est le bruit des bombes, l’obscuritédes nuits qu’aucune électricitén’éclaire, l’incapacité de se déplacerlibrement—et ils ignorent que rien detout cela n’est normal.

    Dans la vie qu’on mène à Gaza,rien n’est normal. La Nakba n’est pasun simple souvenir, c’est une réalitépermanente. Nous acceptons l’idéequ’un jour ou l’autre, nous mourrons.

    Courrier du CVPR, n°69 - p. 16

    dossier

    AveC LA GrAnde mArChe dU retoUr, LeS PALeStInIenSdemAndent à vIvre dAnS LA dIGnItÉ

    Par Ahmad ABU rtemAh (1)

    La nakba n’est pas unsimple souvenir, c’est uneréalité permanente. nousacceptons l’idée qu’un jourou l’autre, nous mourrons.A Gaza, la tragédie, c’estque nous ne pouvons pasvivre.

    C es huit derniers jours, desdizaines de milliers de mani-festants de Gaza ont animéd’une vie nouvelle un lieu qui étaitlentement en train de perdre toutetrace de vie. Nous nous sommes ras-semblés, entonnant et chantant uneberceuse qui hantait nos rêves - “ Nous reviendrons” - faisant offran-de de tout ce qui nous reste, dansnotre volonté de réaliser notre droitde vivre dans la liberté et la justice.Malgré nos marches pacifiques, nousnous sommes heurtés à des nuées degaz lacrymogène et à des ballesréelles tirées par des soldats israé-liens. Hélas, ce n’est pas une nou-veauté pour les Palestiniens de Gaza,

    Photo reçue de Nurit Peled

  • A Gaza, la tragédie, c’est que nous nepouvons pas vivre. Si nous tenonsbon, c’est en dépit de cette dure réali-té. Depuis deux vendredis nous fai-sons face à toutes les puissances quinous disent de céder et de mourir ensilence, nous avons décidé de mar-cher pour la vie. C’est la protestationd’un peuple qui ne veut rien de plusque de vivre dans la dignité.

    La marche du retour

    En 2011, des Palestiniens ont mar-ché en se rapprochant des frontièresdepuis la Syrie, le Liban, la Jordanie,Gaza, et la Cisjordanie. Certains ontété tués, d’autres sont parvenus à fran-chir les frontières et se sont fait arrêterpar des soldats israéliens. Mais bienplus loin dans le temps, en 1976, desPalestiniens ont protesté contre l’ex-propriation de leurs terres par Israël,ce mouvement ayant pris plus tard lenom de Journée de la Terre. SixPalestiniens ont alors été tués et, 42ans plus tard, Israël fait encore recoursà une violence meurtrière pour empê-cher les réfugiés de rentrer, tuant aumoins 25 Palestiniens à Gaza depuisvendredi dernier. Ces êtres humainsont osé projeter leurs rêves au-delà desruelles des camps de réfugiés ; ils onteu la vision d’un foyer qu’ils n’au-raient jamais la possibilité de voir.

    Je me suis inquiété pour notresécurité quand nous nous sommesavancés par milliers dans le secteurqualifié par Israël de “ zone d’exclu-sion ”. J’ai réfléchi aux conséquences.Debout avec ma famille près de laplace de la Marche du Retour, dansl’est de Khan Younis, nous avons tousreçu du gaz lacrymogène, y comprisles enfants. Cela m’a fait de la peinede voir l’innocence de l’enfancesouillée par cette expérience traumati-sante. Mais il y a un point que beau-coup de gens ne comprennent pas : àGaza, que nous soyons dans nos mai-sons ou rassemblés dans les champspour manifester, nous ne sommesjamais vraiment en sécurité, nous nesommes jamais vraiment vivants.Tout se passe comme si toute notreexistence, avec nos rêves de rejoindreun jour notre foyer et de vivre dans ladignité, devait se cacher dans le noir.

    Cette année, après que Trump areconnu Jérusalem comme capitaled’Israël et a estimé possible de réussir

    ce qu’il a appelél’“accord dusiècle”, les Pales-tiniens ont eu lesentiment qu’unegrave menace pe-sait sur le droitlégal au retour desréfugiés, bien qu’ilsoit consacré parla résolution 194des Nations Unies.Nous éprouvonsune préoccupationcollective quant ànos droits de réfugiés, qui semblentbien compromis, et nous devons résis-ter à cette menace de façon novatrice,unifiée, révolutionnaire—selon unemodalité échappant aux paramètres desnégociations et des dissensions entrefactions, pour faire pression sur Israëlen revendiquant nos droits.

    depuis 70 ans, Israël persiste sansrelâche à déplacer et à humilier lesPalestiniens. Cela s’est passé en1948, et de nouveau en 1967, et main-tenant nous y assistons encore, avecla croissance des colonies. en mêmetemps qu’Israël force les Palestiniensà partir, il fait venir de nouveauximmigrants du monde entier et lesinstalle sur des terres volées auxPalestiniens, violant ainsi le droitinternational. mais Israël est enhar-di par l’absence de pression de lapart de la communauté internationa-le et par le soutien de l’administra-tion trump, si bien que les coloniesne cessent de s’étendre inexorable-ment. (NDLR : souligné par nous)Israël ferait volontiers croire au reste dumonde que nous, les Palestiniens,avons choisi de quitter nos foyers et demener cette vie dégradante, en l’absen-ce des droits humains les plus fonda-mentaux ; bref, que nous serions res-ponsables de notre propre situation.

    résistance

    Aujourd’hui, nous, Palestiniens deGaza, nous efforçons de briser leschaînes auxquelles Israël a voulu noussoumettre. Nous sommes des manifes-tants non armés qui opposent à dessoldats lourdement armés leur protes-tation pacifique. De ce fait, Israël peutdifficilement nous diffamer et justifiersa violence sans frein, et le mondeconstate la réalité : des civils inno-cents se font tuer uniquement pour

    avoir exercé leur droit de manifesta-tion pacifique. Les prétextes invoquéspar Israël pour justifier sa politique àl’égard des Palestiniens perdent peu àpeu de leur efficacité, car les hommeset les femmes du monde entier voientde plus en plus clairement que le vraivisage d’Israël est celui d’un régimebrutal d’apartheid.

    Malgré la violence calculée et leciblage de manifestants non arméspar Israël, nous, Palestiniens deGaza, avec notre Grande Marche duRetour, affirmons haut et fort quenous sommes encore ici. Pour Israël,c’est de notre identité que noussommes coupables, mais nous célé-brons précisément cette identitéqu’Israël tente de criminaliser. Despersonnes de tous les milieux rejoi-gnent la marche. Des artistes contri-buent avec la danse traditionnelle, ledabké, des intellectuels organisentdes cercles de lecture, des comédienss’habillent en clowns et jouent avecles enfants. C’est bien là le plus frap-pant : ces jeunes pleins de vie,joueurs, dont le rire est la plus belleprotestation.

    L’ONU a lancé une mise en garde,annonçant que la bande de Gazarisque d’être inhabitable d’ici deuxans. Résistant au sort qu’Israël a prévupour nous, nous ripostons pacifique-ment avec nos corps et notre amour dela vie, et nous invoquons ce qu’il resteencore de justice en ce monde.

    7 avril pour the nation - traduction Sm pour l'AUrdIP

    (1) Ahmad Abu Rtemah est un écrivain indé-pendant et activiste des médias sociaux baséà Gaza, et un des organisateurs de la GrandeMarche du Retour.

    Source : Marie-Claude Vignaud - Al [email protected]

    dossier

    Courrier du CVPR, n°69 - p. 17

    DR